Leadership « Coach »: un leader qui croit en vous !

Coach sportif ou entraîneur auprès d'un joueur de tennis sur le courtDernier style de notre série sur le leadership, le leader « Coach », qui cherche à renforcer les capacités de ses collaborateurs. Enclin au dialogue constructif, bienveillant mais exigeant, le leader « Coach » investit sur ses équipes à long terme. Il maîtrise l’écoute active et l’art du feedback, il sait aussi bien soutenir que responsabiliser. Aurions-nous trouvé le style de leadership qui fait rêver ? Dans les faits, c’est un style difficile à mettre en oeuvre car guider tout en laissant l’autonomie… Voilà une posture tout en finesse !

Caroline aime développer les potentiels dans son équipe

Caroline aime les petites équipes, et particulièrement celle qu’elle dirige aujourd’hui. Comme souvent dans sa carrière, elle est tombée sur des personnes en lesquelles elle croit. Aurait-elle de la chance ? Elle voit bien des lacunes en chacun, des points faibles. Mais dans l’ensemble, elle perçoit surtout un grand potentiel de développement pour Nicolas, Alan, Céline et Christophe. Ce potentiel Caroline n’aime pas le voir en sommeil. Alors chaque jour elle écoute et dialogue. Elle soutient et guide chacun d’entre eux pour qu’il comble ses lacunes et développe ses compétences. Caroline est typique du leader « Coach », et son équipe l’apprécie beaucoup pour cela.

Le leader qui croit en vous

Forcément, même avec ses guillemets, j’ai un faible pour ce leader-là. Nous partageons une valeur commune : le développement humain, associée à la croyance que chaque collaborateur peut déployer son potentiel.

En revanche les ressemblances s’arrêtent ici. En effet, le leader ne peut avoir une posture de coach car il a un rapport hiérarchique, il n’est pas formé au coaching , et sa relation n’est pas celle d’un coach à son coaché avec tout ce que cela implique. Notamment parce qu’il a des attentes et un « agenda » concernant ses collaborateurs, alors que le coach est au service de son coaché.

Cette précaution prise et sans entrer dans un débat, revenons sur la philosophie du leader « Coach ».

Un développeur de l’humain

C’est un leader qui investit sur les personnes, il est prêt à leur consacrer du temps. A un moment ou un autre il va vous demander comment vous vous voyez dans l’entreprise, aujourd’hui et demain. Il s’intéresse à vos objectifs personnels, à vos aspirations, à ce qui vous motive. Son but est de relier ces objectifs à ceux de l’entreprise. Par conséquent, il va chercher à déceler vos points d’amélioration, et mettre en évidence vos talents. Ainsi, il crée une relation personnelle, unique.

Ce qu’il veut : vous voir progresser, vous aider à déployer votre potentiel
Ce qui lui déplaît : la stagnation, le gâchis de talent, le désengagement

Un exemple :

Caroline a identifié qu’Alan se met souvent en retrait dans les échanges. Et qu’il s’arrange pour laisser à d’autres les présentations devant les clients. Or Caroline a noté qu’Alan était très convaincant quand il présentait les produits : les clients l’écoutent, montrent de l’intérêt et posent des questions. Et Caroline aimerait qu’Alan joue ce rôle plus souvent. Elle pense que c’est bon pour l’entreprise mais aussi pour lui-même qui souhaite évoluer dans un rôle de business developer (dans lequel il sera amené à faire de nombreuses présentations clients). Caroline demande à Alan ce qu’il en pense, fait le lien avec ses objectifs à lui, lui propose son soutien, lui demande de quoi il a besoin.

Le leader Coach a l’art de faire sortir un collaborateur de sa zone de confort, comme ici Caroline avec Alan.

L’exemple de David Ogilvy, l’écoute d’un dirigeant

Daniel Goleman, dans Primal Leadership, cite en exemple David Ogilvy (dirigeant la célèbre agence de publicité du même nom) venu s’asseoir un soir dans le bureau de Shelley Lazarus, alors nouvelle venue et… enceinte de 8 mois. Elle travaillait tard. Il a pris le temps de la faire parler de sa vie, de ses voeux de carrière, de ce qu’elle envisageait quand son enfant serait né. Cette conversation s’est prolongée les semaines suivantes. Et c’est en partie grâce à ces échanges que, des années plus tard, Shelley Lazarus est toujours là et dirige Ogilvy & Mather WorldWide, l’agence de publicité fondée par Ogilvy.

Cet esprit dont David Ogilvy a fait preuve est bien traduit par le conseil qu’il a donné à Shelley Lazarus quand elle a été nommée CEO. Un conseil qu’elle cite dans Harvard Business Review comme ayant joué un grand rôle dans sa vie :

« No matter how much time you spend thinking about, worrying about, focusing on, questioning the value of, and evaluating people, it won’t be enough…. People are the only thing that matters, and the only thing you should think about, because when that part is right, everything else works. » David Ogilvy
« Quel que soit le temps que vous passez à réfléchir aux gens, à vous soucier d’eux, à vous concentrer sur eux, à vous questionner sur leur valeur, ce temps n’est jamais assez… Les gens sont la seule chose qui compte, et ils devraient être votre seul sujet de réflexion car quand cette partie est bonne, tout le reste fonctionne. » David Ogilvy

Sa logique : viser le long terme (point commun avec le Visionnaire) et la globalité des personnes, tout en tenant compte des objectifs plus proches (point commun avec le Directif et le Chef de file).

Un style de leadership motivant

C’est pourtant le style qui favorise le plus la motivation intrinsèque – puisque le leader cherche à la faire s’exprimer puis à la relier aux objectifs de l’entreprise ! C’est un peu comme si le leader Coach invitait chacun à être Visionnaire pour lui-même. Et qu’il s’arrangeait ensuite pour créer des liens entre cette vision et les objectifs de l’entreprise.

Les effets sur le climat d’équipe / d’entreprise sont très positifs puisque chacun se sent considéré et soutenu. Au-delà des individus, le leader « Coach » cherche la construction d’équipes compétentes.

Un art délicat

Dans les faits, on entend souvent parler de leadership « Coach » (de la bouche des leaders eux-mêmes qui pensent « coacher ») bien plus souvent qu’on ne le voit en action. Le leadership « Coach » est peut-être le style le plus délicat à mettre en oeuvre.

Voici les freins principaux à son expression – il y en a d’autres.

Le temps… toujours le temps !

Le leader qui cherche à « coacher » son équipe a besoin de temps, nous l’avons vu. Un temps d’écoute, consacré à la personne dans ce qu’elle est, un temps pour explorer sans agir, un temps pour clarifier les objectifs et le chemin… vous êtes toujours là ? Eh oui, beaucoup de leaders n’ont pas le temps de faire tout cela.

En outre, le leader « Coach » construit sur la durée, il doit donc parfois se passer de résultats rapides pour viser un résultat plus grand, plus tard.
ex : accepter qu’une commerciale rende une proposition imparfaite à un client, pour qu’elle apprenne de ses manques et s’améliore en toute autonomie.
Ici un leader Directif ou Chef de file n’aura pas la patience d’accepter des erreurs et d’attendre l’amélioration.

Le leadership « Coach » demande de prendre de la hauteur, de sortir de l’agenda de la semaine et de penser à plus long terme. Cette disponibilité-là, comment la trouver dans un planning surchargé ? Eternel dilemme des leaders !

Le goût des autres… qui me ressemblent?

Ce style implique que l’on s’intéresse aux personnes, à qui elles sont.,Et cet intérêt doit être sincère pour mener à des échanges plus profonds que « tu as terminé le dossier Z ? ».

C’est aussi croire en un potentiel, en les talents spécifiques à cette personne… et non identiques à ceux de leur leader.

Par exemple Renaud, vous vous souvenez, notre leader Chef de file, dit souvent qu’il « coache » son équipe. En réalité il est dans le micro-management et au lieu de développer le potentiel, il a tendance à forcer l’autre à entrer dans une case prédéfinie. Là où le leader « coach » cultive l’excellence individuelle, le leader Chef de file cherche à faire des clones de lui-même !

Les attentes d’un chef

Comme Renaud, tous les leaders ont des attentes et un agenda, d’où une difficulté de taille : comment être patient avec des équipes quand ses propres objectifs de leader en dépendent ?
Le stress, le manque de confiance en l’autre peuvent faire revenir l’apprenti Leader Coach dans sa zone de confort où il est plus Chef de file ou Directif.

C’est peut-être une des raisons qui font que bien souvent les leaders qui essayent d’adopter ce style tombent davantage dans le micro-management : ils prennent le verbe coacher pour un synonymes de « faire marcher au pas ». C’est un peu un directif avec un masque de coach !

Les limites de l’exercice

Autre difficulté : savoir poser des limites justes et efficaces. Le leader « Coach » doit avoir les idées claires sur son rôle et ce qu’il attend du collaborateur dans l’échange.
En effet, entre soutenir et encourager, laisser faire, exiger tout de même… le leader « Coach » marche sur un fil ! Guider tout en laissant l’autonomie est une posture assez peu naturelle.

Poser ses limites de leader, c’est responsabiliser ses collaborateurs et expliciter où s’arrête la responsablité de chacun (collaborateur, leader).

Et enfin, le leader « Coach » a besoin de maîtriser l’art du feedback constructif.

Equilibrer son Leadership « Coach »

Pour les leaders qui ont cette pâte de leadership « Coach », voici quelques pistes de réflexion.

Quand l’utiliser : ce style est optimal pour aider un collaborateur compétent et motivé à améliorer sa productivité, développer ses ressources être plus efficace dans l’autonomie. Ce style fonctionne mieux avec les personnes motrices et en demande d’évolution.

A l’inverse ne pas l’utiliser
: avec des collaborateurs peu autonomes, qui attendent une liste de tâches précises à exécuter (et attendent donc du micro-management) – on ne responsabilise pas quelqu’un contre son gré.

Les compétences en intelligence émotionnelles utilisée(s) : Développement des autres, conscience de ses émotions, empathie

Compétences opposées qui peuvent être travaillées pour un meilleur équilibre : Développement de soi et capacité à passer outre la réaction d’autrui, par exemple.
J’ajouterais qu’à la grande confiance dans les capacités de chacun, le leader « Coach » gagne à adjoindre une lucidité bien réaliste et savoir se dire parfois que ce collaborateur-là est décidément bien peu motivé malgré tous les efforts de son « Coach » ! Et s’il valait mieux s’en séparer ? Un (leader) « Coach » doit savoir renoncer ;)

Le style Leader « Coach » n’est pas efficace pour des résultats rapides, ni pour obtenir des collaborateurs qu’ils rentrent dans un moule pré-défini. Pour cela, le leader Directif ou le Chef de file sont bien plus efficaces.

Conclusion

Le leader « Coach » a à coeur de construire une équipe gagnante sur le long terme. Pour cela il s’intéresse à chaque individu, révèle ses talents, l’aide à les développer et à combler ses manques. Ce style s’avère complexe à mettre en oeuvre dans un contexte de pression sur les résultats et de quête de performance immédiate. De plus il requiert des qualités rarement réunies en un seul leader : bienveillance, exigence, confiance, fermeté, patience, empathie… S’il réussit, il devient le leader le plus habile à construire une relation positive et porteuse de progression des individus et des équipes.  A lui de ne pas perdre de vue les objectifs de l’entreprise, que cette progression toute humaine doit tout de même servir !

D’après : Daniel Goleman’s “Leadership That Gets Results” (Harvard Business Review, March-April 2000)

4 Commentaires

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    • Guillaume sur 1 septembre 2017 à 9 h 29 min
    • Répondre

    Bonjour,
    Quand j’ai récupéré mon service, j’avais un collaborateur que la direction me demandait de licencier s’il ne s’améliorait pas en 6 mois. La personne avait vécu des années de micro-management, se faisait engueuler à tout va car les instructions n’étaient pas claires et souvent contradictoires. J’avais un collaborateur qui ne prenait aucune initiative.
    L’article dit qu’il ne faut pas utiliser la méthode sur un collaborateur pas autonome. C’est pourtant le pari que j’ai fait. En effet, le manque d’autonomie n’est pas forcément intrinsèque, mais plus lié au contexte dans lequel il a évolué. Donc méfiance.
    Bilan après un an : le collaborateur n’a pas été viré, il est aujourd’hui moteur, vient régulièrement me voir avec de nouvelles idées pour s’améliorer ou améliorer le service. J’ai gagné un formidable relais, et qq’un sur qui je peux m’appuyer :)

    1. Bonjour Guillaume,
      merci pour votre témoignage éloquent sur un management qui fait grandir et qui croit en l’autre. Cette personne a sans doute eu de la chance de vous trouver sur sa route ! Et vous avez dû vivre là une expérience gratifiante et enrichissante pour vous.
      Vous avez raison, l’approche « manager coach » peut être utilisée aussi avec une personne qui ne « semble » pas autonome : il est important de vérifier que son manque d’autonomie n’est pas liée à un contexte (type de mission, de tâche, style de management etc.) La philosophie du manager coach, c’est de croire que le collaborateur est, ou sera, capable. Choisir la confiance.
      En revanche, et c’est ce que j’ai voulu dire, ce style Manager coach est à utiliser progressivement, en accompagnement à l’autonomie. Il y a des degrés dans cette approche, entre pour commencer, par exemple, « tu me poses une question, peut-être que tu as déjà des éléments de réponse, qu’en penses-tu ? Si tu ne trouves pas je t’aiderai », et à l’extrême avec un collaborateur très autonome sur son sujet « fais comme tu le sens, je te fais confiance, tu es le mieux placé pour agir ».

    • lankomo sur 13 novembre 2012 à 14 h 06 min
    • Répondre

    bonjour karine, je suis intéresse par vos recherches et je viens de terminer ma formation sur le coaching à résultat rapide une nouvelle approche de la banque mondiale, je voudrais approfondir mes compétences sur le coaching et leadership, si vous pouvais me documenter.
    Merci

    • gueu sur 1 octobre 2012 à 18 h 23 min
    • Répondre

    c’est une bonne formation j’ai apprecie

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