L’obéissance, jadis pilier de l’éducation des enfants et règle de fonctionnement naturelle dans certaines entreprise. Cette obéissance est-elle encore de mise aujourd’hui en management, dans nos entreprises ? Obéir et vouloir l’obéissance, ces intentions nous parlent de notre conception de la relation à l’autre. Avec des enjeux de pouvoir et la question du libre-arbitre.
Qu’est-ce qu’obéir ? Prenons son contraire : désobéir, c’est refuser d’obéir à quelqu’un, en ne faisant pas ce qu’il commande de faire. Voire, en faisant ce qu’il défend ! C’est aussi refuser de se soumettre à une règle, une loi : désobéir au règlement.
Obéir ou se soumettre ?
Obéir et désobéir contiennent l’idée de soumission – à une règle ou à une personne. Avec la nuance qu’obéissance et désobéissance sont des actes choisis, où nous restons acteur. Paradoxalement, on peut donc choisir de se soumettre. Boris Cyrulnik apporte une nuance intéressante :
« Obéir n’est pas se soumettre : dans la soumission, je suis contraint à faire ce que veut l’Autre, alors que dans l’obéissance, je veux bien faire ce qu’il veut, j’y consens. » Boris Cyrulnik, Autobiographie d’un épouvantail, p.163
L’obéissance parle de notre relation d’infériorité ou non à quelque chose ou quelqu’un qui nous est – en principe – supérieur. Comme par exemple la loi, un supérieur hiérarchique ou un parent. Désobéir à une loi ou se mettre au-dessus d’elle, c’est la même chose. Cela parle de la position que nous prenons, et de l’exercice de notre libre-arbitre.
Obéir à qui, à quoi ?
C’est aussi un choix dicté par notre rapport à l’autre, notre relation avec lui. Dicté, aussi, par les émotions déclenchées par la demande (crainte, envie de faire plaisir etc.) Et enfin, notre relation à ce qui est demandé, avec de possibles conflits entre ces éléments, d’où les dilemmes.
Obéissance et désobéissance en entreprise
Ces notions ont-elles cours en entreprise ?
Sont-elles pertinentes dans l’application de directives, dans l’exécution de demandes émanant d’un responsable hiérarchique ?
Est-il préférable, plus efficace et durable par exemple, de rechercher la responsabilisation du collaborateur, qui s’approprie sa mission et devient autonome ?
L’obéissance à certaines règles de l’entreprise est bien sûr de mise : règlement intérieur, règles juridiques et financières etc. C’est le contrat pour que le collectif puisse travailler ensemble.
Mais quand il y a injonction d’obéir, que se passe-t-il ? Le besoin d’utiliser une injonction révèle que celui qui l’emploie n’est pas suivi naturellement. Il a donc besoin de l’imposer, ce qui est une forme de force.
Rapport de pouvoir
Il y a ce moment pour le manager où, un collaborateur ne… collaborant pas, le manager est tenté de monter d’un ton. “Je t’avais demandé de le faire”, “ce n’était pas qu’une proposition”, “est-ce que j’ai été clair ?” etc.
Un ton qui rappelle la grosse voix parentale : “Je suis ton père et c’est moi qui décide”. Il y a là comme un besoin de réaffirmer son statut hiérarchique, sa position de pouvoir. « Je suis ton CHEF ! »
Dans certains contextes, un leader directif est bien accepté et suivi, le simple fait d’être le chef ou l’ancien fait loi.
Mais de plus en plus dans nos entreprises, il faut justifier expliquer ou vendre sa demande. On sort du concept d’obéissance, pour aller vers une recherche d’adhésion et de responsabilisation. Le collaborateur n’est alors plus exécutant, mais moteur dans sa mission.
Les générations plus jeunes (Y, Z) semblent mieux fonctionner sur ce mode, tandis que la génération X comprendrait, elle, plus facilement, l’ancien fonctionnement. Sans toutefois s’y plier systématiquement. D’autant qu’il peut être inspirant de voir de jeunes collègues refuser le jeu de l’obéissance.
Dans certaines cultures, l’obéissance est le modus vivendi au sein de l’entreprise. Mais elle peut être aussi, avec le mode directif, une manière de s’adapter à une urgence : en cas de crise aiguë qui nécessite d’agir vite et bien, un seul chef à bord. Il qui donne des directives et a besoin qu’elles soient suivies sans délai et parfois à la lettre.
Motivation intrinsèque
Le bénéfice de sortir du modèle d’obéissance ? Le collaborateur peut aller plus loin que la demande qui lui est exprimée, ou la devancer (pro-activité) ; il peut apporter sa propre valeur ajoutée et montrer sa créativité. Agir non parce qu’on lui demande mais parce qu’il le veut.
Manager des personnalités différentes
Le premier est un chef de projet qui apprend son métier et respecte rigoureusement les méthodes qu’on lui enseigne. Il suit les consignes “à la lettre”… parfois en dépit du bon sens.
Le second, un chef de projet “rebelle” qui n’en fait qu’à sa tête et pense que sa méthode personnelle de gestion de projet est la bonne. Il n’envoie pas son compte-rendu hebdomadaire, et Sylvie le rappelle à l’ordre régulièrement.
Le troisième, c’est une chef de projet très autonome qui devance les attentes de Sylvie : non seulement elle répond aux attentes de sa responsable, mais en plus elle va plus loin, propose des améliorations à l’organisation, apporte de l’aide à ses collègues, etc.
On retrouve dans ces deux thèmes de l’obéissance et de l’autonomie, l’articulation entre motivation extrinsèque et motivation intrisèque.
Seule la seconde est gage d’engagement, d’appropriation de l’action, de valeur ajoutée.
Quand vous demandez l’obéissance, vous placez le collaborateur en situation de motivation extrinsèque (sauf pour ceux qui ont une motivation intrinsèque… à obéir !)
Miser la collaboration plutôt que l’exécution
Vous placez la relation sur le terrain du pouvoir et non de la collaboration ; cela peut inhiber la créativité et l’initiative… voire appeler des comportements contre-productifs.
Ainsi le collaborateur obéissant risque-t-il de suivre, dans ce qui est demandé, la lettre et non l’esprit. On ne lui demande pas d’être intelligent mais d’exécuter (« comme à l’armée ») ; au mieux il obéit et son action sera limitée à l’ordre donné, au pire il se rebelle et peut jouer au plus malin. Par exemple, identifier des erreurs dans les ordres donnés mais choisir de ne pas les signaler.
Certains désobéissent pour faire ce qui leur semble juste / efficace / pertinent. Exemples : une infirmière qui n’administre pas à la lettre le traitement demandé par le médecin par qu’elle le croit mal adapté. Ou un cadre qui n’applique pas exactement une directive car son propre jugement lui dicte une action plus efficace.
A ce sujet les expériences de Milgram, de Stanford et de Charles K. Hofling sont riches d’enseignements sur notre manière d’obéir à l’autorité.
Entrer ou non dans une relation d’obéissance, c’est choisir de se positionner face à son manager ou l’équipe que l’on manage. C’est choisir le type de relation, d’interaction, et de collaboration que l’on veut instaurer. Une bonne conscience de soi est essentielle pour faire ce choix de manière claire !
Quelques liens pour prolonger
– Les types psychologiques parlent de notre part normative, du respect des règles etc. Ainsi le type 1 en ennéagramme, le type conformiste dans le modèle DISC, la position de vie d’Enfant Soumis Adapté en analyse transactionnelle, ainsi que la position de vie -/+ en analyse transactionnelle qui peut amener à se soumettre à l’autre.
>>S’agit-il d’asseoir son autorité ou de développer une posture ?
>> Les expériences de Milgram, de Stanford et de Charles K. Hofling.
Que puis-je pour vous ?
Grâce au coaching vous pouvez mettre en place de nouveaux fonctionnements et sortir de vos automatismes. Votre rapport à l’obéissance vous pose problème ? Vous aimeriez le clarifier et modifier votre fonctionnement ?
Je peux vous aider : parlons-en et définissons ensemble votre objectif.