C’est la crise. Elle est mondiale, sévère, et elle dure, c’est vrai. Mais chaque fois que j’entends « c’est la crise », j’ai envie de répondre « So what? » Car au-delà du constat réaliste, il y a là une perception qui me semble inutilement limitante. Se dire que c’est la crise, c’est s’attendre à une réussite moyenne, et c’est ne pas tout faire pour réussir… Autrement dit, c’est donner dans le capitulisme. Partir battu n’ayant jamais aidé à gagner, je vous propose un conte pour réfléchir aux effets de « C’est la crise ».
L’exemple d’un chef d’entreprise dont les affaires n’allaient pas bien, m’a interpelée. Il répétait « c’est la crise » depuis si longtemps que je me suis demandée où était la cause de son malheur : crise réelle ou crise perçue ?
Il m’inspire ce petit conte :
Il était une fois un chef d’entreprise qui revenait de deux années de retraite au fond de l’Amazonie. Il avait laissé son DG tenir la barre, et il revenait en ce début d’année 2012, fort de tout ce qu’il avait appris et compris. En rentrant, il a trouvé ses équipes bien maussades, il s’est dit qu’un voyage sur le fleuve Amazone leur ferait du bien. Son DG lui a présenté les tableaux de pilotage, notre dirigeant a trouvé les résultats médiocres depuis 18 mois, il s’est dit qu’il y avait sûrement des points à améliorer en avant-vente et en production, il s’y attèlerait dès le lendemain avec ses managers. Le DG lui a montré les tableaux prévisionnels, notre dirigeant s’est étonné du peu d’ambition qu’il y voyait ; il a corrigé en rouge toutes les prévisions à la hausse, sourd aux commentaires du DG qui secouait la tête en répétant « c’est impossible, avec la crise ». Notre dirigeant n’avait rien entendu de la crise mondiale, alors, il ne faisait pas attention à ce mot « crise » qui revenait parfois dans les paroles de ses collaborateurs. Quelle crise ? En quelques mois, l’activité de la société s’est nettement améliorée : davantage de contrats, des marges améliorées, des équipes plus engagées, une meilleure ambiance. Et pourtant, dehors, c’était la crise.
Moralité : Il ne savait pas que c’était la crise, alors il l’a fait. Ou comment éviter la prophétie autoréalisatrice.
Penser et dire « c’est la crise » nous aide-t-il à atteindre nos objectifs ?
Cette expression contagieuse mérite-t-elle d’être ainsi relayée sans critique ni nuance ?
Oui, il y a une crise mondiale, personne ne le niera. Mais porter son attention sur elle comme s’il n’y avait que cela, oriente nos choix dans une direction qui… produit des effets de crise !
Quelques exemples :
– « C’est la crise », donc il est normal que ce client n’ait pas répondu à mon offre commerciale. Pas le peine que je le rappelle et que je perde mon temps. D’ailleurs pourquoi prospecter en temps de crise ?
Ici notre dirigeant revenu d’Amazonie aurait demandé que l’on rappelle le client, avec peut-être une réussite à la clé.
– « C’est la crise », donc j’ai une bonne excuse pour ne pas atteindre les objectifs fixés par ma direction. Je ne suis pas responsable du résultat. Autant attendre que la crise passe !
>> Lire Manager un… roi de l’excuse
– « C’est la crise », donc je réduis tous mes budgets et même des dépenses modestes comme le repas trimestriel avec mon équipe, ou le cadeau bonus à chaque challenge remporté. D’ailleurs il vaudrait mieux couper toutes les dépenses, car il faut se serrer la ceinture. (Et arrêter de respirer, non ?)
A vous, que faites-vous de différent quand vous pensez « c’est la crise » ?
– « C’est la crise », donc je…
Et est-ce que cela vous aide à avancer vers vos objectifs ?
Question subsidiaire : et pour vos concurrents, comment cela se passe-t-il ? Comment subissent-ils cette crise ?
A vous ! Question de coach :
- Dans quelles situations dites-vous « C’est la crise »
- Pour chaque situation, que faites-vous en conséquence ?
- Est-ce le meilleur choix pour avancer vers vos objectifs ?
2 Commentaires
Très chouette article !
Je suis entièrement d’accord, et pour autant j’ai l’impression de l’entendre de plus en plus autour de moi, de toutes les tranches de population, des jeunes aux retraités.
Et pourtant adopter une attitude de contraction, de protection ne fait qu’accentuer les effets qui sont crains.
Alors que nous continuons tous à vivre ! :-) et très correctement, soyons honnêtes… et puis ça stimule la créativité pour trouver aussi de nouvelles façons de vivre !
par exemple, ici en Bretagne le covoiturage pour les trajets du quotidien explose, les aires de covoiturage sont bondées tous les jours de la semaine, et meme le week end. Je trouve super que cette « crise » favorise de nouveaux comportements, qui passent par créer plus de liens et de partage entre êtres humains !
alors mon slogan : c’est la crise donc je partage !!! :-)
Hello Christelle
Merci de ton partage.
Nous l’entendons souvent cette phrase, le pire c’est qu’elle n’est pas nouvelle.
Très bien dit, « l’attitude de contraction » ! C’est exactement ça, comme quand il fait froid – d’ailleurs ne dit-on pas qu’il faut rester au chaud quand dehors c’est la crise.
Frilosité, peurs, inertie…
Ainsi tu nous amènes sur la voie de la créativité (soyons génératifs ;) et de la consommation collaborative. ça me fait penser au double sens de la crise en chinois, composée de deux idéogrammes, l’un signifiant « danger », l’autre, « opportunité de changement ».